Un derviche qui « marche » bien en français: Tentative bibliographique à la veille d’une réédition. Sara Yontan

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L‘Observatoire de la Turquie contemporaine a le plaisir de publier cet article inédit de Sara Yontan Musnik, conservatrice, chargée des collections turques à la BnF de 1992 à 2018. Il s’agit d’une bibliographie des publications en français des poèmes de YUNUS EMRE.

       1.Introduction

Les éditions Turquoise comptent nous proposer une nouvelle édition, bilingue cette fois ci, d’un livre publié en 1973 par les Publications orientalistes de France à Paris.  Ce petit volume de 38 pages intitulé tout simplement Poèmes de Younous Emre comporte à peine 15 textes et quelques « fragments » choisis du poète turcophone Yunus Emre.  La sélection est de Güzin Dino, alors une référence en France sur la littérature turque.  Elle a également contribué aux traductions, effectuées en collaboration étroite avec Marc Delouze, poète français encore très actif et prolifique.

Cette seconde édition sera, nous dit-on, augmentée des extraits d’un exposé que les deux traducteurs ont présenté lors d’un colloque sur la traduction poétique et dont les actes ont été publiés verbatim par Gallimard en 1978[1].  Pour ma part j’étais chargée de trouver les textes originaux des poèmes traduits, ce qui n’était pas une mince affaire comme je l’explique plus loin.  Güzin Dino n’étant hélas plus parmi nous, Marc Delouze a gentiment accepté de revoir sa préface et ses traductions.  Tout cela sera expliqué dans l’ouvrage que les Editions Turquoise programment pour la rentrée littéraire de 2022, soit en septembre prochain. 

En cherchant les textes originaux de Yunus Emre à la Bibliothèque nationale de France et à la BULAC, je me suis amusée à creuser du côté des traductions françaises du poète, très nombreuses, à ma surprise. 

En attendant que cette contribution bibliographique paraisse dans le livre en préparation, voici en guise d’un « travail en cours » ou de « work in progress » le fruit de ma curiosité et de mes recherches qui datent de 2020.

2.La recherche des textes en turc

L’ouvrage que les traducteurs du volume cité plus haut ont consulté pour effectuer le choix des textes à traduire en français est un livre publié par le grand spécialiste de la littérature soufi Abdülbâki Gölpinarlı (1900-1982).  Son étude qui date du début des années 1960 indique à ses lecteurs les divers manuscrits de l’œuvre de Yunus Emre connus et conservés alors dans trois bibliothèques turques ainsi que les copies qui se trouvaient encore dans les collections privées du bouquiniste Raif Yelkenci (1894-1974) et de l’orientaliste allemand Hellmut Ritter (1892-1971).  Après avoir comparé toutes les cinq versions, Gölpinarlı s’arrête sur celle conservée par la Bibliothèque de Süleymaniye (Istanbul) fonds Fatih, n° 3889, qu’il juge être la plus complète de toutes.  Dans son livre, il en fournit un fac-similé, une transcription en alphabet latin du turc, un dictionnaire des mots inconnus du lectorat « contemporain » et des explications scientifiques d’ordre littéraire. Le tout formant un gros volume de presque 800 pages :

Yunus Emre Risalat al-Nushiyya ve Dîvan ;Abdülbâki Gölpinarlı : Önsöz-Lûgat-Açıklama

Eskişehir Turizm ve tanıtma derneği yay., 1

[Istanbul] 1965

24 cm ; LIII-310-[419] p.

C’est donc ce livre qui a servi pour déterminer les textes originaux sélectionnés par Güzin Dino pour l’édition de 1973.  Cependant trouver un poème original en turc du XIIIe siècle à partir d’une traduction-adaptation en français de nos jours parmi les centaines de poèmes portant, non un titre mais un numéro, n’était pas tâche facile et il a fallu compléter l’exercice de traçage à l’aide d’une autre édition des poèmes de Yunus Emre. Plus récente celle-ci est une étude qui comporte un index des premiers couplets et un autre des noms propres, tous deux d’un grand secours.  Malgré cela, les quelques « fragments » que Guzine Dino et Marc Delouze ont ajouté alors au petit volume restent introuvables.  C’est pour cette raison que les Editions Turquoises ont décidé de les reconstituer en turc contemporain à travers leur traduction française ! 

La récente édition des textes du poète est de 2005 en cinq volumes.  Intitulée Yunus Emre Külliyatı, elle est le travail du spécialiste de la littérature mystique soufie, Mustafa Tatçı (1961- ) :

Vol. 1, Yunus Emre Divanı : tahlil, inceleme  (Gözden geçirilmiş ilaveli baskı) 495 p.

Comportant les poèmes complets de Yunus Emre et des analyses

Vol. 2, Yunus Emre Divanı : tenkitli metin (Gözden geçirilmiş ilaveli baskı ) 649 p.

La suite des poèmes complets de Yunus Emre, avec une édition critique des textes accompagnée d’un index des poèmes (p. 469-480) et d’un dictionnaire (p. 403-468)

Vol. 3, Risaletü’n-nushiyye, tenkitli metin (Gözden geçirilmiş ilaveli baskı) 353 p.

Comprenant l’autre œuvre de Yunus Emre que l’on traduirait par Compédium ou Epitre des admonitions et son édition critique.

Malgré ce que le titre annonce, le volume intègre également le manuscrit du divan conservé par la bibliothèque de la Société turque d’histoire (Türk Tarih Kurumu) n° 376 qui avait échappé à Gölpinarlı (voir plus haut).

Vol. 4, Aşık Yunus :  Aşık Yunus veya Yunusların şiirleri 268 p.

Traduction du titre : Yunus le troubadour ou les poèmes des Yunus

En effet, il est largement admis qu’il n’y avait peut-être pas une seule et unique personne qui incarnait Yunus Emre mais plusieurs poètes populaires qui signaient de ce nom.  Ce volume les présente et s’accompagne d’un index de ces poèmes.

Vol. 5, Yunus Emre şerhleri 446 p.                 

Commentaires des œuvres de Yunus Emre.  Ce volume comprend une bibliographie très fournie (p. 257-263) et un index très utile de l’ensemble des textes attribués à ou aux Yunus Emre.

3. Yunus Emre en Turquie

Le peu que les spécialistes savent de Yunus Emre permet de le situer à la fin du XIIIe siècle, époque où les poètes populaires comme lui disaient leurs textes mais ne les écrivaient pas. Plus tard dans le temps, d’autres, qui avaient entendu ces poèmes ou ces fragments des textes, récités ou chantés, parfois même modifiés par créativité ou bien par facétie de la mémoire, mais toujours par tradition orale, de génération en génération, de lieu en lieu, de bouches à oreilles, ceux-là ont commencé à les transcrire. Ceci a donné les divers manuscrits qui, par définition, comportent des variantes.  Le plus ancien des manuscrits datés serait du XIV ou XVe siècle et aucun autographe bien entendu.

Pour ce qui est des livres imprimés, des dizaines — voire davantage — de volumes réunissant les poèmes de Yunus Emre ont été publiés en Turquie depuis que l’imprimerie turque a vu le jour dans l’Empire ottoman[2].  Cependant, pour la plupart, il s’agit d’une sélection et même parfois des fragments extraits des poèmes, parmi les centaines attribués au poète.  Ou plutôt « aux Yunus », car plus de la moitié de ces textes seraient apocryphes.

Détail de la première page de Dîvân-ı aşık Yunus Emre, Lithographie de 1924, Atelier de Hafiz Aziz

Le premier imprimé de l’œuvre « complète » date de 1340 i.e. 1924 du calendrier grégorien et il est en caractères arabes. Le Dîvân-ı aşık Yunus Emre comprend également le Rîsâlet’ün-Nüshiyye et ne compte que 188 pages.  C’est une lithographie sortie de l’atelier de Hafız Aziz et son neuveu Raif[3].  A peine une décennie après la publication de ce premier recueil, plus précisément en 1933, alors que la Turquie a déjà adopté les caractères latins, Burhan Ümit[4] établira une édition plus complète de 576 pages et fera imprimer le volume chez le Maître Ahmet Halit sous le titre de Yunüs (sic) Emre Divanı.  L’auteur examinera 16 manuscrits conservés dans plusieurs villes en Turquie et arrivera au chiffre d’environ 900 poèmes complets ou fragmentaires.   Cette édition qui au final comporte 355 textes connaîtra un plus grand succès par rapport à la précédente.  Est-ce parce qu’il est d’une qualité exceptionnelle ou parce qu’il est de bon ton à cette époque-là de mettre en valeur les poètes dits « populaires » ?  Un an plus tôt on a fondé la société savante pour la langue turque (Türk dil kurumu) qui lance le projet de deux grands dictionnaires dont l’un dépouille les écrits en turc depuis le XIIIe siècle (où l’on situe Yunus Emre donc) et l’autre recense les parlers anatoliens considérés plus authentiques que la langue choyée de l’élite ottomane. Celle-ci avait un goût pour le vocabulaire et les tournures de l’arabe et du persan. 

Ainsi, Yunus Emre fut célébré par le nationalisme linguistique de la République naissante mais également par un certain courant de « gauche » qui acclamait le message universel et la sagesse du peuple porté par les textes du poète.  Ce courant louait les valeurs de l’Anatolie, ou la ruralité, que représentait Yunus.  Bientôt les romanciers auront comme protagonistes les paysans ; les héros seront des Memed le Mince.

Cependant, Yunus Emre est un soufi, un musulman qui s’adresse à Dieu avec autant d’ardeur qu’il met à s’adresser à l’Humanité avec sagesse.  Dieu est l’Ami, le Juste et le cœur du croyant l’entend autant que l’oreille du pratiquant. Si pour les pieux ses paroles parfois hérétiques sont des mots vertueux, pour les « mécréants » elles représentent le rejet de l’obscurantisme.  En somme, par sa grandeur littéraire autant que philosophique, Yunus Emre est le poète le plus consensuel. Il inspire encore aujourd’hui en Turquie chercheurs et  maisons d’éditions .

En 1970, İsmet Binark et Nejat Sefercioğlu, tous deux alors en poste à la Bibliothèque nationale d’Ankara, établissaient une bibliographie des publications turques dédiées à Yunus Emre : elle comptait déjà 48 pages in-8 !  Un demi-siècle plus tard, les entrées ont sans aucun doute doublé voire même triplé, il suffit d’en faire une requête informatique sur le site de la Bibliothèque nationale turque pour s’en rendre compte.[5]

4.Yunus Emre en français

Pour notre part, nous proposons une bibliographie en langue française[6] : on ne prendrait aucun risque de démenti en avançant que Yunus Emre reste encore le poète turc le plus traduit en français, et ce par une variété de traducteurs estimables.  

Le lecteur français rencontre Yunus Emre pour la première fois dans l’Encyclopédie de l’Islam des éditions Brill, sous « La littérature turque islamique » rédigé par le grand historien des lettres turques Memed Fuad Köprülü[7].  Nous sommes en 1934.  Parallèlement, on traduit des poèmes de Yunus Emre dans des revues francophones publiés en Turquie.  Deux décennies plus tard, les turcologues Louis Bazin et Paul Dumont ne manquent pas de lui réserver une page dans le premier volume d’Histoire des littératures dirigée par Raymond Queneau[8].

Entre temps, en 1949, les éditions prestigieuses GLM [Guy Lévis Mano] lancent le premier livre de traduction française réalisé par Yves Régnier qui avait déjà publié quelques-uns de ces textes dans la revue L’Arche fondée sous le patronage de Gide. 

Vous trouverez ci-dessous les références de ces traductions avec quelques commentaires sur chacune d’entre elles.  Ni spécialiste, ni a priori lectrice connaisseuse de Yunus, j’ai comme objectif de fournir quelques appréciations factuelles pour chaque entrée consultée « livre en main » –sauf les encadrées—afin de modestement guider les passionnés autant que les curieux de ce grand poète.  Cela peut éventuellement mener à une étude comparative des traductions. 

Toutes les références évoquées plus haut en turc et celles en français, citées ci-dessous, sont conservées à la Bibliothèque nationale de France et/ou à la Bulac, Bibliothèque universitaire des langues et civilisations, toutes deux dans le 13e arrondissement de Paris.

5.Traductions et/ou adaptation en français de Yunus Emre

1934-1935

Ankara (Edition française hebdomadaire du Hakimiyet-i Milliye)

La rubrique « La Turquie culturelle » des numéros du 12 avril, du 11 août et du 8 septembre 1934, publie un poème de Yunus Emre traduit en français ; le numéro 31 août 1935 en compte déjà trois, insérés dans un long article par Hasan Âli [Yücel] « Le mysticisme dans la littérature turque » dont la seconde partie est à suivre au prochain numéro.  Cependant aucune des traductions n’est signée.  Il est probable qu’il s’agisse de l’écrivain et traducteur des grands auteurs français en turc, Sabahattin Eyüboğlu (1908-1973)

1935

« Quelques‘ ilâhîs’ de Yunüs Emre »par Jean Dinet        

dans Le Voile d’Isis : Études traditionnelles n° 185 p. 196-212

Cette revue, publiée à Paris par Chacornac comprend une contribution de Louis-Charles Damais, qui signait ses traductions du pseudonyme de Jean Dinet.  Damais était diplômé de six langues orientales dont le turc, l’arabe et le persan.  Il précise dans sa présentation qu’il a consulté deux éditions imprimées des poèmes de Yunus Emre, celle en caractères arabes (1924) puis celle en caractères latins de Burhan Ümit Efendi (1933).  Ce dernier qui a établi une édition scientifique et plus complète (mais « fautive par endroits ») aurait attribué des titres aux poèmes de Yunus Emre que l’auteur des traductions reprend pour son choix des dix ilâhî .

1946

L’Arche : Revue mensuelle (édition de Paris) dans son Vol. III, n° 14 de mars-avril 1946 publie « Quatre poèmes » rendus en français par Yves Régnier. A la suite des poèmes la rédaction ajoute une notice brève sur le poète et divise son œuvre en quatre périodes : hantise de la mort, découverte de la voie mystique, connaissance mystique, union.

1946-1947

Yunus Emre : Oratorio en trois parties pour soli, chœur et orchestre, Op. 26 de A. Adnan Saygun.  

Voir plus bas la partie dédiée à la musique. 

Si le livret de la Salle Pleyel où le morceau fut joué en avril 1947 indique que les paroles françaises sont d’Eugène Borel, les treize textes seraient traduits par Bedrettin Tuncel, Sabahattin Eyüboğlu et Louis Bazin.[9]  Il est aisé de conclure que Borel (1876-1962), musicologue et connaisseur, entre autres, de la musique turque, aurait sans doute adapté la traduction du trio Tuncel-Eyüboğlu-Bazin à la musique de Saygun. 

1948

La quinzaine d’Ankara, bimensuelle publiée par la Direction générale de la Presse, Vol. 2, N° 28 du 1er avril, contient deux poèmes de Yunus Emre traduits par Burhan Toprak.

1949

Poèmes adaptés par Yves Régnier [traduits du turc par Burhan Toprak]

Paris : GLM

19 cm ; 33 p.

Dédicacé au compositeur Maurice Ohana, ce petit livre très soigné, tiré sur du vélin et numéroté, offre seize poèmes choisis pour être « le plus chargés d’expression » par Régnier qui dit les avoir adaptés.  La traduction littérale est de Burhan Toprak (ou Burhan Ümid 1906-1967), celui même qui a publié la première édition en caractères latins de Yunus Emre en 1933. C’est encore Toprak qui guide Régnier dans l’ordre des textes qui suivraient une

« Ascension mystique ».

1953

« La Joie de Yunus Emre » par Mehmet Kaplan dans

Dialogues, Cahiers de littérature et linguistique, publiés par l’Institut de Philologie française et romane de la faculté des Lettres d’Istanbul.  (N° 3, juillet)

Traduction de quelques textes de Yunus Emre

1955

Textes mystiques d’Orient et d’Occident choisis et présentés par Solange Lemaître.

Paris : Eds. D’Histoire de d’Art

24 cm ; 321 p.

Le tome 1 qui s’intitule Mystiques d’Orient (Le Sel de la Terre) présente 2 poèmes de Yunus Emre traduits en français.  Le premier est de Marcel Caga ( ?-1955),  un Arménien d’Istanbul qui aurait œuvré comme traducteur pendant la Guerre d’Indépendance.  Il traduit d’autres poèmes dans ce volume, pas tous du turc.  Le second poème renvoie à une œuvre[10] de Louis Massignon, islamologue et prêtre, que l’on ne savait pas turcophone.  A creuser…

1956

« Question de poésie » par Sabahattin Eyüboğlu dans

Dialogues, Cahiers de littérature et linguistique, publiés par l’Institut de Philologie française et romane de la faculté des Lettres d’Istanbul.  (N° 4, février)

Traduction d’un poème de Yunus Emre

1961

Poésie populaire des Turcs et des Kurdes traduit du turc par Gérard Chaliand.

Paris : François Maspéro

20 cm ; 146 p.

La première partie comprend les poètes turcs et comporte neuf poèmes de Yunus Emre (p. 51-67).  Une seconde livraison en fac-similé de cette édition par les Editions d’Aujourd’hui est datée 1976.

1963

Le Divan traduit et préfacé par Yves Régnier

Paris : Gallimard,

17,5 cm ; 127 p.

Seconde édition du précédent, comportant une préface intitulée « Tombeau de Younus Emré » qui annonce 63 textes poétiques courts mais qui n’en comporte que 61.  Tous relus par l’historien d’art, critique littéraire et traducteur Bourhan Toprak (sic).  Chaque poème s’achève avec le nom de Yunus Emre calligraphié en caractères arabes et en divers styles (divani, neshi, etc.).  L’ouvrage s’ouvre sur un portrait de Yunus Emre, imaginé par un artiste anonyme mais recyclé maintes fois pour être gravé dans la mémoire collective du lectorat turc.

[1964 ?]

Anthologie de la chanson populaire turque, [poèmes choisis et traduits par] Nimet Arzık, Ankara : s.é.

20 cm ; 129 p.

Dix textes de Yunus Emre dont la majorité sera reprise dans l’anthologie de Gallimard en 1968.

1968

Anthologie de la poésie turque (XIII-XX siècles).  Textes choisis, présentés et traduits par Nimet Arzik.

Paris : Gallimard

20 cm ; 168 p.

Cette anthologie qui brasse 8 siècles de poésie turque commence par 10 poèmes de Yunus Emre ; ils sont précédés d’une notice sur le poète.

1968

Le droit d’Etre un Homme : anthologie mondiale de la liberté.   Recueil de textes préparé sous la direction de Jeanne Hersch.

Paris : Unesco

25 cm ; 588 p.

Pertev Naili Boratav, folkloriste de renom, devait quitter la Turquie pour des raisons politiques. Il fut accueilli par la France et a fait carrière au CNRS.  Dans cet ouvrage collectif qui marque le 20e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, on trouve six textes de Yunus Emre, traduits par ses soins.  Le poète turc du XIIIe siècle se trouve ainsi aux côtés des citations des sages indiens, écrivains russes et philosophes allemands, entre autres. 

1973

Poèmes [choisis et] traduits du turc par Guzine Dino et Marc Delouze ; dessins de Abidine Dino.

Paris : Publications orientalistes de France,

18 cm ; 38-[3] p.

Il s’agit de la première édition du livre dont la seconde édition est annoncée pour septembre 2022 ; elle est augmentée des notes de Güzine Dino qui seront également mises « au goût du jour » presque un demi-siècle plus tard. 

1973

Poèmes Textes choisis et traduits par Tahsin Saraç

Ankara : Ministère du tourisme et de l’information

155 p. ; 17 cm

Deux autres éditions suivent en 1996, toutes deux publiées par le Ministère, désormais devenu « de la Culture », alors que le traducteur est décédé depuis 7 ans.  Si le nombre de pages et les dimensions sont quasiment identiques, le choix des poèmes est fait par İkram Saraç dans l’un et par le spécialiste de la littérature soufi Abdülbaki Gölpınarlı (1900-1982) dans l’autre.

1974

Yunus Emre par Sabahattin Eyüboğlu

Ankara : Unesco

21 cm ; 269 p.

Cet essayiste et traducteur en turc de grands auteurs français, a publié plusieurs travaux sur Yunus Emre en turc.  Cette traduction en français fut publiée de façon posthume.

1974

Yunus Emre présenté par Sabahattin Eyüboğlu ; traduction par Azra Erhat

Ankara : Commission nationale turque pour l’Unesco

20 cm ; 270 p.

Impossible de déterminer si ces deux références trouvées dans le catalogue de la Bibliothèque nationale d’Ankara concernent le même ouvrage.  L’apport de Azra Erhat, classiciste et traductrice polyglotte aurait été très précieuse.

1986

La Montagne d’en face : poèmes des derviches anatoliens textes choisis par Güzine Dino ; présentés et traduits par Güzine Dino, Michèle Acquien et Pierre Chuvin.  Encres d’Abidine.

Fata Morgana

23 cm ; 115 p.

Les pages 23 à 33 de ce volume sont consacrées au derviş Yunus. Ici le choix des textes et sans doute la traduction sont de  Güzin Dino, qui, on le précise, a rédigé l’article « Younous Emré » de l’Encyclopaedia Universalis, édition 1968-75 en commençant ainsi : « Trois figures de proue de la Renaissance ont perçu la teneur profondément novatrice de l’appel poétique de Yunus Emre ; il s’agit d’Érasme, de Martin Luther et de Sebastian Franck (1499-1542) »

1987

Le Livre de l’amour sublime présenté par Dominique Halbout Du Tanney et Pierre Seghers

Paris : Seghers

19 cm ; 109 p.

Edition décorée et illustrée de quelques miniatures ottomanes.  Dominique Halbout de Tanney, turcologue, traduit et rédige l’introduction (p. 5-18) alors que Pierre Seghers, après un texte intitulé « D’un ardent…» (p. 19-36) se charge de la version française de ces poèmes qui occupent les pages 38 à 103.  Deux pages de notes suivent.

1990

Poésie populaire des Turcs traduite par Gérard Chaliand

Presses universitaires de Lyon

17 cm ; 103 p.

Edition bilingue dont les pages 75 à la fin sont de Yunus Emre, en turc et en français.

[1990 ?]

Şiirler = Poèmes traduitdu turc par Nimet Arzık

Ankara : Ministère de la culture

19 cm ; [97] p.

Edition bilingue : original et traduction au regard pour 23 textes ; 7 textes sont uniquement en français.

Bien que la présentation de l’ouvrage précise qu’il s’agit d’une « quarantaine de poèmes choisis avec soin et traduits avec délicatesse », le livre ne contient que 30 poèmes.  Contrairement aux originaux, ceux-là portent des titres.  Ainsi, il est possible que la traductrice ait travaillé sur le recueil de Toprak connu pour avoir attribué des titres aux poèmes de Yunus Emre qui n’en avaient aucun.  Cependant cette traduction ne fournit aucune indication quant aux sources d’où les textes ont été tirés.

1991

La Langue de Yunus Emre : contribution à l’histoire du turc pré-ottoman / Saïd Khourchid

Ankara, Société turque d’histoire,

23 cm ; 3 tomes. en 1 vol. : 578 p.

Il s’agit de la thèse de doctorat de Saïd Khourchid, arabisant, rédigée sous la direction du turcologue Louis Bazin, qui se consacre, comme le titre le précise, à la langue du poète.  La deuxième partie du travail est la traduction du Risalet ün-nushiyye, Epître d’admonitions (p. 316-362) suivie de celle des 205 poèmes du Dîvan. L’ouvrage comprend un index des expressions arabes, un autre des principaux thèmes mystiques du vocabulaire du Dîvan et enfin un troisième des mots d’origine grecque, latine, arménienne et germanique dans la langue du poète. 

Le manuscrit qui a servi pour ce travail n’est pas précisé mais par la bibliographie on peut déduire qu’il s’agit de celui édité par Burhan Toprak en 1933 et étudié par A. Gölpinarli en 1965.  Cette bibliographie ne cite aucune traduction française, l’argument étant qu’elles soient toutes « fragmentaires » ce qui ne convient sans doute pas à un travail scientifique.

1991

Anka : revue d’art et de littérature de Turquie

Le numéro 15 (été-automne 1991) qui est consacré à Yunus Emre comporte plusieurs poèmes du poète, choisis et traduits parTahsin Saraç, Dominique Halbout-du-Tanney, Sabahattin Eyüboğlu, le Père André Duchemin, Guzine Dino, Michèle Aquien, Pierre Chuvin, Nimet Arzık et Marc Delouze.  Il s’agit pour la plupart des extraits d’ouvrages publiés et cités plus haut (à l’exception de deux références que nous n’avons pas pu consulter et qui sont encadrées).

Les p. 165-190 du Colloque sur Yunus Emre intitulé Message universel et publié un an plus tard par l’Inalco à Paris reprend presque les mêmes textes.

2004

Les chants du pauvre Yunus traduit du turc et présenté par Gérard Pfister

Paris – : Afuyen

18 cm ; 105 p.

Entre la préface d’une vingtaine de pages au début du livre et une note biographique sur Yunus Emre de cinq pages à la fin, ce petit ouvrage contient 29 poèmes dont tous, sauf le premier et le dernier, sont en version bilingue turc-français.  Ils sont présentés en cinq parties.

Gérard Pfister, lui-même poète, dit avoir traduit à partir des éditions « récentes » turques, l’une de Memet Fuat et l’autre de Cahit Öztelli .  Ces derniers ont publié plusieurs fois sur Yunus Emre, les mêmes ouvrages étant tirés à de nombreuses reprises, comme c’est souvent le cas en Turquie.  A noter que Öztelli est décédé en 1978 et Memet Fuat en 2002, c’est-à-dire avant 2004.

Pfister utiliser un procédée intéressante qu’il explique ainsi : « Afin de mieux faire ressortir le rythme des poèmes de Yunus Emre, le choix a été fait d’uniformiser leur présentation.  C’est ainsi que, sur le modèle des nombreux poèmes en vers de huit pieds, on a accentué la forte césure articulant les vers de quatorze pieds en les scindant en deux hémistiches de sept pieds.  De même, pour que soit mieux marqué le français, le refrain qui, dans l’original, souligne la plupart des strophes, on a pris le parti de le faire ressortir en caractères italiques »

2006

Le petit livre des conseils traduit du turc et présenté par P. André Duchemin ; préface [i.e. postface] par P. Yves Danjou

Paris – Orbey : Arfuyen,

18,5 cm ; 120 p.

Enseignant lazariste au Collège Saint Benoît d’Istanbul pendant les décennies 1940, 1950, André Duchemin aurait traduit Risalet ün-Nüshiyye,  (Compédium des Admonitions) que Yunus Emre avait commis avant ses poèmes (Dïvan).  La traduction fut publiée pour la première fois dans le tome VII de Turcica, Revue des études turques, en 1975

L’ouvrage comprend une note sur le texte et une note biographique sur le traducteur

2012

Cantiques d’abandon et d’adoration : quatorze chants extraits du « Divan » de Younous Émrè / choisis, présentés et traduits du turk seljouqide par Rémy Dor

Paris : Asiathèque,

24 cm ; 89 p.

Edition trilingue : l’original transcrit en caractères latins suivi de notes et explications, traduit en moyen-français et en français moderne.

L’auteur, turcologue et linguiste, distingue sur le texte de départ, la base du turc seldjoukide et les apports de l’arabe et du persan avec un jeu de couleurs qui, loin de rendre l’ouvrage difficile à lire, produit un effet plutôt esthétique.  L’original est accompagné de notes.  La version en français du XIVe-XVe siècle restitue l’archaïsme, alors que la traduction en français moderne est littérale et informative.  On a ainsi tous les ingrédients pour apprécier la poésie de Yunus Emre. 

Dans son introduction Rémy Dor précise qu’il a retenu 14 poèmes sur les 205 et donne les références aux folios du manuscrit.  Bien que cela ne soit pas explicitement dit, on comprend qu’il a utilisé le Divan conservé à la Bibliothèque de Süleymaniye, à Istanbul, fonds Fatih.

2013

Je n’ai pas trouvé de chemin menant au monde : trois poètes turcs / Karadja Oghlan, Pir Sultan Abdal, Yunus Emre ; présentés et traduits par Gérard Chaliand

Paris : Editions de l’Aube

19 cm ; 103 p.

Cet ouvrage comprend des textes de trois poètes « populaire » dont Yunus Emre, présenté ici avec sept poèmes en version bilingue, turc et français.  Gérard Chaliand dédicace son travail à son ami Attila Tokatlı sans lequel il n’aurait pas entrepris cette traduction.  L’introduction qui présente les trois poètes ne mentionne pas de quel manuscrit –ou transcription– sont tirés les sept textes de Yunus.  La lecture est fluide avec peu de notes en bas de pages, fournissant des explications brèves.

[2015]

Poèmes choisis du Divan de Yunus Emre, édités par Demet Küçük ; traduits par Mustafa Eren.

Istanbul : Profil yay.

16 cm ; 34 p.

2020

L’amour de la poésie : les poèmes spirituels de Yûnus Emre (1240-1320)

traduction de Paul Ballanfat

Paris : L’Harmattan.

24 cm ; 351 p.

Après une quinzaine de pages d’introduction savante, l’auteur de ce travail colossal ne traduit pas moins de 415 poèmes de Yunus Emre sur plus de trois cents pages.  S’il donne les variantes des vers trouvées dans différents manuscrits en notes de bas de page, attestant qu’il a bien pris connaissances des différentes versions existantes, il ne donne aucune référence à ces sources.  Dans ses remerciements, Ballanfat exprime sa reconnaissance envers le grand spécialiste contemporain Mustafa Tatçı (voir la bibliographie des ouvrages en turc) qui lui, dans sa dernière édition des œuvres de Yunus Emre, ne manque pas de fournir toutes les sources textuelles. L’ouvrage est muni d’un glossaire de noms propres et des mots rares mais nous n’y avons pas trouvé de bibliographie.

6.Etudes en français

La livraison en 1931 de l’Encyclopédie de l’Islam publiée par l’éditeur orientaliste de Leyde, Brill, consacre plus de soixante-quinze pages sur deux colonnes à l’entrée « TÜRK » dont la seconde partie se concentre plus précisément sur les Turcs ottomans.  La section réservée à la littérature est rédigée par Fuad Köprülüzade qui est alors le premier à introduire Yunus Emre à la communauté des Orientalistes francophones.  Il le désigne comme le plus grand représentant de son genre qui aurait lancé la tradition de cette poésie parmi divers courants mystiques, orthodoxes et hétérodoxes, en Asie Mineur.

En 1955, La Pléiade publie Histoire des littératures en deux volumes dont le premier, sous la direction de Raymond Queneau, est dédié aux littératures anciennes, orientales et oralesLouis Bazin et Paul Dumont, tous les deux turcologues, sont chargés de la littérature turque qu’ils résument sur une trentaine de pages dont une entière, très élogieuse, sur Yoûnus Emrè : « D’origine paysanne et pauvre, ce fils de la terre turque » est « encore aujourd’hui parfaitement compris et apprécié par la nation toute entière ».

Si Yunus Emre est mentionné dans l’article « Littérature turque » que contribue Pertev Naili Boratav contribue à l’Histoire générale des littératures (1961)[11],  deux autres ouvrages de référence considèrent qu’il est temps de réserver des entrées dédiées au poète : on trouve le « Yunus Emre » de Louis Bazin[12] dans le Grand Larousse Encyclopédique en dix volumes (1960-64) en un petit paragraphe de quatre phrases ; et le « Younous Emré » de Güzin Dino dans le troisième tome du Dictionnaire des littératures[13], où il occupe une bonne demie page (1968).

Déjà en 1955, Alessio Bombaci de l’Orientale de Naples publie en italien l’Histoire de la littérature turque qui sera traduite par Irène Melikoff et publiée par la Librairie C. Kliencksieck à Paris en 1968.  La place de Yunus Emre y est très importante (p. 228-247).  De nombreux extraits de son œuvre sont tirés depuis l’édition turque de Gölpınarlı.  Cependant Bombaci trouve que ce « génie national » qui s’oppose à la littérature de cour est très à la mode et de ce fait gagne une importance linguistique, mais que l’appréciation de la valeur esthétique de ses vers est exagérée.  « Dans les temps modernes Yunus Emre est devenu à la mode en Turquie ».

En 1991, l’Unesco commémore le 750e anniversaire de la naissance de Yunus Emre et les actes du colloque sont publiés un an plus tard sous le titre de Yunus Emre, message universel.

La même année, Saïd Khourchid publie sa thèse de doctorat qu’il a rédigée sous la direction de Louis Bazin : La Langue de Yunus Emre : contribution à l’histoire du turc pré-ottoman

Ankara : Société turque d’histoire, 1991

Trois décennies plus tard, une autre thèse, philosophique et littéraire cette fois, voie le jour

Paul Ballanfat Poésie en ruines : la pensée et la poétique de Yûnus Emre

Paris : L’Harmattan, 2020. 607 p.

7.Yunus Emre comme « inspiration » aux autres expressions artistiques

Les paroles de Yunus Emre ont d’abord inspiré les musiciens.  Les partitions ont été réunies dans deux livres parus en Turquie, en 1991 et 1993. Yunus Emre a aussi été le protagoniste de nombreux romans, pièces de théâtre, films et surtout séries télévisées en Turquie.  Les autorités locales ont même lancé deux concours en 2012 : « Meilleur roman Yunus Emre » et « Meilleure pièce de théâtre Yunus Emre ».  Une de ces pièces, écrite déjà en 1976, a été rendue en français :

Younous Emré : pièce de théâtre en trois actes / Necip Fazıl Kısakürek ; trad. [du turc] par Mahmut Kanık.

Ankara : Ministère de la Culture, 1991

Un texte d’introduction présente le poète comme une âme mystique et universelle, désireuse de suivre la voie de la science, de la connaissance et de l’amour… guidée par le prophète.  En effet, un des personnages est cette « voix solennelle cachée » s’adresse souvent au protagoniste qui lui rend « Toi qui est beau, ainsi que ton nom Mahomet » ! 

Yunus Emre a aussi inspiré la scène française

Chant profond de la Turquie de Eve Griliquez ; texte de Emre Yunus ; textes de Nâzim Hikmet ; de Pir sultan Abdal de Karacaoğlan ; musique de Erdem Buri ; avec Robert Darame (comédien), Eve Griliquez (comédienne), Tuly Sand (chant) [et al.]

Peinture de : Abidine. – 4 représentations. – Dans le cadre de 3e Rencontres de la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon.  Spectacle présenté dans le cadre du 30e Festival d’Avignon. Dir. P. Puaux (11 juillet-8 août 1976)

.

Et de nombreux enregistrements musicaux dont

Musique classique turque : hommage à Yunus Emre / cœur national ; Nevzad Atlig, dir

Paris : Auvidis 1992 (K7 & CD)

***

Asik : chants d’amour et de sagesse d’Anatolie / Kudsi Erguner, collecteur ; Nuray Hafiftas, Ali Ekber Ciçek, Turan Engin… [et al.], chant

Paris : Maison des cultures du monde 1994 (CD)

***

Kirjuhel chante Yunus Emre / Kirjuhel, chant guit hrp p luth ; Jean-Paul Auboux, fl ; Hugo Crotti-Lovera, vl ; Hélène Fajoles, chant

Paris : Revoe, 1989 (Disque 33t)

***

Yunus Emre : oratorio en trois parties pour soli, choeur et orchestre : op. 26 : [musique de] Ahmed Adnan Saygun : [texte seul] : [programme] / [Yunus Emre] ; [paroles françaises d’Eugène Borrel]

Paris : [s.n.], 1947 8 p. : portrait ; 23 cm

Programme de concert donné à la Salle Pleyel, le mardi 1er avril 1947. – Comporte le texte seul en français[14]

***

Turquie : musique soufie / par Nezih Uzel, chant., tambour sur cadre ; Kudsi Erguner, ney

Paris : Maison des cultures du monde ; 1994 (CD)

***

Fasil : concert de musique classique ottomane / Cinuçen Tanrikorur, ud, chant ; Murat Salim Tokaç, ney, tanbûr ; Fahrettin Sükrü Yarkin, bendir, daïré

Paris : Le Chant du monde ; Arles : distrib. Harmonia mundi France, 1995 (CD)

***

Psaumes de Yunus Emré :  musique soufie / Kudsi Erguner, comp. ; Kudsi Erguner, ney ; Yusuf Bilgin, chant ; Bruno Caillat, zarb, bendir, daf

 [S.l.] : [s.n.], [s.d.]


[1]Colloque sur la traduction poétique organisé par le Centre Afrique-Asie-Europe de l’Institut de littérature générale et comparée, Sorbonne nouvelle-Paris III, les 8-10 décembre 1972… ; préface d’Étiemble ; postface de Roger Caillois. NRF-Gallimard, 1978, p. 1951-185

[2] Dans l’Empire ottoman, les premiers livres imprimés en turc en caractères arabes remontent à l’année 1728 et sont au nombre de 17.  Plus tôt il était interdit d’imprimer en turc.  Très vite cette première presse s’arrête de fonctionner et il faut attendre le XIXe siècle pour que l’activité de l’imprimerie reprenne et se répande.

[3] Le jeune Raif n’est autre que Raif Yelkenci qui deviendra un bouquiniste de grand renom à Istanbul qui collectionnait et vendait notamment des manuscrits.  Il aurait beaucoup travaillé sur Yunus Emre sans pour autant avoir publié ses recherches.  Son article paru dans le quotidien Cumhuriyet du 2 février 1940 où il avance que Yunus Emre et un autre poète soufi Aşık Paşa (1272-1333) seraient une et même personne a cependant fait date : « Bir etüt – bir iddia, Büyük Türk Şairi Yunus Emre kimdir ? »

[4] Burhan Ümid ou Ümit s’appellera Burhan Toprak (1906-1967) suite à la loi sur le nom de famille promulguée en 1934.  Francophone, il fait ses études supérieures à la Sorbonne et dirige l’Académie de Beaux-Arts d’Istanbul. Dans son Introduction à cet ouvrage monumental, il dira qu’avant de découvrir Yunus Emre, il trouvait la littérature turque ennuyeuse, les poètes populaires simples et ordinaires et écœurant, le langage fleuri et répétitif des poètes du dîvan!

[5] Il existe un nombre de bibliographies sur Yunus Emre, mais chacune est établie de façon différente selon.  Celle de Tatçı de 1988 publiée par la Milli Kütüphane d’Ankara compte déjà 104 pages.

[6] Timour Muhidine a établi déjà en 1992 la liste des traductions en français dans le volume du colloque (voir plus bas) : Yunus Emre : Message universel (Paris : Inalco) p. 157-158 : « Yunus Emre : Approche bibliographique ».

[7] Encyclopédie de l’Islam : dictionnaire géographique, ethnographique et biographique des peuples musulmans… Leiden : E.J. Brill, IV, 1934, p. 989-990. 

[8] « Littérature turque » dans Histoire des Littératures, I : Littératures anciennes, orientales et orales. Gallimard, 1955

[9] Cf. L’aventure de cette traduction est relatée par un de ses traducteurs, Bedrettin Tuncel (1908-1980), professeur de langue et littérature françaises à l’Université d’Ankara, dans un excellent article : « Fransızcada Yunus Emre » in Erdem 6 (16) 127-176

[10] « La légende de Hallacé Mansûr en pays Turcs » dans Revue des études islamiques, Geuthner.  Pas d’autres précisions !

[11] Histoire générale des littératures.  Paris : A. Quillet, 1961. Paradoxalement, Yunus Emre a une place plus modeste dans la contribution de Pertev Naili Boratav intitulée « Littérature populaire » au second volume du monumental Philologicae Turcicae Fundamenta (Wiesbaden : Franz Steiner, 1964).  Cependant un article en langue allemande traite du poète plus longuement.

[12] L’entrée n’est pas signée mais il est indiqué que l’on confie la littérature turque à Louis Bazin.

[13] Dictionnaire des littératures publié sous la direction de Philippe Van Tieghem avec la collaboration de Pierre Josserand.  Paris : PUF, 1968 (3 volumes)

[14] Voir plus haut, les traductions pour l’année 1946-47.

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