Turquie : il y a 23 ans, Abdullah Ocalan, le leader du PKK, était arrêté – Europe 1

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« Il y a 23 ans, une annonce se répandait comme une traînée de poudre partout en Europe. En Grèce, en Allemagne, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, des militants kurdes envahissaient des ambassades, des consulats et prenaient en otage des diplomates. Du lundi au vendredi, Pauline Jacot dans « Le jour où ». Aujourd’hui, elle revient sur l’arrestation d’Abdullah Ocalan » dit Pauline Jacot dans Europe 1.

En Grèce, en Allemagne, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, des militants kurdes envahissaient des ambassades, des consulats et prenaient en otage des diplomates il y a 23 ans. La raison de ce soulèvement ? L’arrestation du chef du PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan Abdullah Ocalan. Le leader du PKK était l’homme le plus recherché par la Turquie. En février 1999, l’ennemi public numéro 1 d’Ankara est arrêté à Nairobi au Kenya devant l’ambassade de Grèce où Abdullah Ocalan se cachait depuis deux semaines. Le principal artisan de la lutte armée depuis 1984, dans l’est de la Turquie, est escorté par des hommes en cagoule noire, les services secrets turcs, direction l’aéroport. Le jet privé s’envole vers Istanbul.

« Dans les maquis du Kurdistan irakien, Apo, c’est le surnom d’Ocalan, est un héros », racontait alors Jean-Pierre Montanay, envoyé spécial d’Europe 1 à Istanbul. « Héros aussi pour la diaspora, qui caresse encore l’espoir, impossible, d’un pays souverain. Mais ici, à Istanbul, où un habitant sur trois est Kurde, on a du mal à se reconnaître dans cette lutte armée sans fin, et sans résultats. » Détesté par les Turcs, celui qui a fondé le PKK en 1978 est jugé responsable des 30.000 morts de la guerre. Le « tueur d’enfants », d’après Ankara est un terroriste.

Des méthodes contestées dans ses rangs

Face à la lutte implacable des Turcs contre les Kurdes, avec des tortures, des massacres et des villages rasés, Abdullah Ocalan commençait à perdre sa crédibilité raconte François Clémenceau : « Les méthodes politiques d’Ocalan étaient contestées jusque dans ses propres rangs. Les purges étaient nombreuses, et les méthodes de mise au pas de la diaspora s’assimilaient de plus en plus à un comportement mafieux. Le trafic de drogues pour acheter des armes, n’incitait pas aux finasseries. »

Quelques heures après l’arrestation d’Ocalan, les autorités turques clament haut et fort que cette capture est une solution au problème kurde. Affirmation immédiatement discréditée dans la rue d’abord, les Kurdes vont manifester leur colère plusieurs jours, partout en Europe, en France comme ici à Marseille. « Ocalan n’a pas cessé de pousser la Turquie vers une solution politique et pacifique à la question kurde. Un jour, nous allons commencer une nouvelle guerre, tout le monde va souffrir dans cette guerre, nous ne serons pas les seuls », expliquait alors un Kurde. 

Toujours détenu

Et dès l’annonce de la capture d’Ocalan, le PKK privé de son chef se réorganise. Le PKK menace d’intensifier et d’étendre la guerre contre la Turquie. C’est le frère du dirigeant kurde, arrêté lundi soir, qui prend la direction du mouvement. Dans un communiqué, la nouvelle direction du PKK ajoute que « dorénavant, aucun responsable turc ne dormira tranquille chez lui. Vous allez le voir très rapidement ».

Pendant ce temps-là, Abdullah Ocalan a donc été conduit en Turquie, il est détenu sur l’île d’Imrali, au sud d’Istanbul. Une île aux allures de bunker décrit Georges Malbrunot en mai 1999, c’est le début du procès du chef du PKK. « Ocalan, derrière sa cage de verre blindé, jouait son va-tout, en confessant ses erreurs. Dans un spectaculaire exercice de repentance, le chef de guerre, au premier jour de son procès, a appelé à mettre un terme à la rébellion armée. » Mais accusé de trahison et de diriger un mouvement terroriste, Abdullah Ocalan sera condamné à mort, peine transformée en prison à perpétuité grâce aux velléités turques d’entrer en Europe. Il est aujourd’hui toujours emprisonné sur l’île d’Imrali en mer de Marmara.

Europe 1, 16 février 2022, Pauline Jacot, Photo/Alberto PIZZOLI/AFP

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